La régulation saisonnière dans la pratique

par

Claudy Jeanmougin

 

Si le titre de cet article manque de précision quant à l’objet de la pratique, il peut être retourné pour devenir « la pratique de la régulation saisonnière » et montrer le double jeu qu’une pratique implique. Ce qui prête à ce jeu est l’association des termes « régulation » et « pratique » par le biais de l’adjectif « saisonnier ». Nous allons donc nous amuser de ces mots pour vous présenter notre prochain stage dont le thème concorde parfaitement avec cet article qui en est la présentation.

 

Pour aborder ce qui suit, il faut être convaincu que l’être humain résulte des énergies du Ciel et de la Terre comme nous le disent les plus vieux textes chinois de médecine. De ce fait, tout changement climatique aura une incidence directe sur nos énergies avec des résultats très divers, mais parfaitement bien analysés par des milliers d’années d’observation, et parfois néfastes s’il n’y a pas conformité aux changements. Comme l’homme est généralement issu du milieu dans lequel il vit, il a acquis une capacité d’adaptabilité qui lui permettra d’entrer en résonance avec le climat sans qu’apparaissent des effets peu salutaires. Si ces effets apparaissent, c’est que les transformations énergétiques nécessaires au bon équilibre n’ont pas eu lieu. Le résultat est que l’être n’est plus en harmonie avec son environnement et qu’il devra en subir les conséquences.

Les chinois vont encore plus loin en disant : si les humains ne se conforment pas aux lois de la nature, cette dernière se retournera contre eux. Malheureusement, le réchauffement de notre planète due à l’effet de serre résultant d’une mauvaise gestion humaine des ressources terrestres ne contredit pas cette mise en garde… L’écologie n’étant pas le propos de l’article, nous supposerons que l’humain n’a pas encore troublé la nature.

 

Notre climat continental présente encore quatre saisons plus ou moins bien marquées, il faut bien le constater. Par bonheur, elles se succèdent toujours dans le même ordre, au rythme de quatre qui marquent l’année solaire. Le passage d’une saison à l’autre, curieusement, n’attire pas l’attention de nos contemporains européens qui acceptent, sans trop de remarques autres que celles qu’il convient de formuler, un état qui devient de moins en moins de fait. L’hiver est là, simple constat borné à une rigueur qui s’installe. Et c’est tout ! Et par chance, un peu de neige, ou de glace, viendra confirmer le verdict des plus anciens, justement eux, habitués de par leur âge aux transformations qui s’opèrent d’une manière quelque peu sournoise, selon une rythmicité que seuls ils peuvent traduire en des termes, clairs pour eux sous la forme de proverbes, obscurs pour nous, humbles terriens que nous sommes, l’oreille collée aux murmures d’une science qui ne sait pas toujours s’exprimer simplement. Bref, on ne réalise la saison que lorsqu’elle est déjà bien avancée. Mais, au juste instant avant que l’hiver ne soit là, était-ce encore l’automne ? La nature pose des limites moins rigides que celles des hommes, l’automne s’estompe petit à petit avec un froid naissant avant de laisser la place à l’hiver. L’hiver naît alors que l’automne n’est pas encore arrivé à son terme. Cette période de chevauchement, durant laquelle rien n’est sûre, courant sur une vingtaine de jours, est qualifiée de période de mutation des énergies d’automne en énergie d’hiver : c’est l’intersaison, courte période durant laquelle notre organisme procède aux transformations qui lui permettront d’être complètement adapté à la saison. Ce qui vient d’être dit est vrai pour chaque changement de saison.

 

Il y a autant d’intersaisons qu’il y a de saisons, soit quatre, que les chinois rattachent à l’Elément (ou Mouvement) TERRE parce que nous sommes des terriens et que notre référentiel est la terre sur laquelle nos racines puisent leurs énergies. L’intersaison étant considérée comme une saison à part entière, nous nous retrouvons avec cinq saisons, chacune d’entre elles appartenant à l’un des Cinq Eléments (Mouvements). Durant l’intersaison, il faudra être très vigilant au juste passage saisonnier que nous pouvons aider de deux manières : en adaptant son alimentation et son activité physique.

 

En ce qui nous concerne, nous allons encore plus loin car nous profitons de ces mutations pour pratiquer des nettoyages organiques. Nous sommes convaincus que cette période de changement se passera d’autant mieux que l’organisme aura été purifié ou, au moins, nettoyé, soit débarrassé du plus gros des impuretés qui se sont accumulées au fil des jours d’inattention et de laisser aller, pour ne pas dire d’excès. En vertu des lois de l’énergétique chinoise, il y a un organe ciblé pour chacune des saisons : par exemple, le foie associé à la vésicule biliaire en période printanière. Il convient donc de procéder à une purge hépatique durant l’intersaison hiver-printemps de façon à préparer l’entrée dans la saison correspondant à la sphère hépatique, soit le printemps. Ce nettoyage passe obligatoirement par une alimentation raisonnée puisque le référentiel Terre, dans la loi des Cinq Eléments, concerne, au niveau organique, l’estomac et la Rate. Puisque nous sommes à l’approche de la mutation saisonnière hiver-printemps, le nettoyage hépatique, durant cette intersaison, se fera avec l’ingestion de cholagogues et de cholérétiques en apéritif de préférence. Et cela tombe d’autant bien que nous nous situons juste après une période de nombreuses agapes. Une fois l’intersaison passée, il faut donc nourrir correctement l’organe cible de la saison en respectant la loi des Cinq Eléments. D’où la nécessité de connaître cette loi. Un peu de théorie d’énergétique chinoise est donc indispensable pour pouvoir agir au mieux au niveau de son alimentation.

 

En plus de cette connaissance théorique, il en faut une autre non négligeable, celle de l’action des aliments ingérés. Il ne s’agit plus de préparer un plat pour seulement combler une faim, mais bien de se nourrir, de nourrir un corps en fonction de ses besoins au juste instant. Il nous semble que l’approche chinoise des effets alimentaires en fonction des saisons soit des mieux appropriée, sans pour autant laisser de côté celle de nos herboristes, faite d’une expérience millénaire également. Nous estimons cependant qu’il ne faut pas mélanger les niveaux de raisonnements : ce sera soit de l’énergétique chinoise soit de l’herboristerie occidentale. Parfois, le recoupement sera tellement évident que nous ne pourrons pas l’éviter. D’un autre côté, ce n’est pas parce que nous utilisons des concepts d’une culture autre que la nôtre que nous devrons nous passer de nos propres aliments et de nos bonnes vieilles recettes. Justement, ce sera peut-être la grande occasion de remettre à l’ordre du jour de vieux bons plats passés aux oubliettes et d’en faire l’analyse en fonction des éléments théoriques que nous aurons abordés. Il s’agira donc d’utiliser les produits locaux et de saison en tenant compte de notre patrimoine gastronomique avec un regard d’énergéticien chinois.

 

Une correction alimentaire est inséparable d’une activité physique adaptée, elle aussi à la saison. Il serait stupide de mener la même vie en hiver et en été… Et c’est pourtant bien ce que nous faisons. Il est vrai que des contraintes professionnelles ne nous encouragent pas à suivre véritablement les saisons, ni ce stupide changement d’heure qui intervient deux fois par an. Ce n’est pas une raison pour ne pas tenter de corriger des comportements, et des activités physique en particulier puisque c’est notre préoccupation. Pour faire une programmation de la régulation avec les activités physiques, nous utiliserons encore la loi des Cinq Eléments. Nous adapterons la forme que vous connaissez de façon à solliciter les méridiens les plus concernés par la saison. Pour nous aider dans ce travail, nous utiliserons des techniques de Qigong.

 

Si nous voulons être vraiment efficace, toutes ces régulations doivent être précédées d’un bilan énergétique individuel de façon à apporter les corrections qui faciliteront le passage saisonnier en fonction de son profil élémental.

 

Théoriquement, la régulation saisonnière a plusieurs modalités d’applications :

-       opération du passage saisonnier avec un nettoyage organique dans le souci d’un entretien régulier de son organisme.

-       Passage saisonnier dans le but de renforcer un organe déficient en fonction du profil énergétique.

-       Correction saisonnière sur un organisme qui n’est pas dans sa saison. Nous commençons à entrer dans le domaine de la pathologie qui nécessite un bilan énergétique. Sans être des thérapeutes, nous pouvons déjà nous faire une idée de la place de l’alimentation dans le domaine thérapeutique, d’où ce terme de diététothérapie parfois utilisé pour parler de la diététique énergétique en médecine chinoise.

 

Un stage de week-end est insuffisant pour faire le tour du sujet. C’est pourquoi nous projetons un cycle de cinq stages, un par saison. Nous commencerons par la régulation de l’élément Terre pour diverses raisons dont certaines déjà évoquées. C’est le référentiel qui intervient à chaque saison et à une période particulière, la fin de l’été (mois d’août) qui voit se commettre de graves erreurs alimentaires. Durant ces stages, il s’agit bien de mettre en pratique ce qui aura été vu théoriquement. Les repas seront préparés par les stagiaires dans le respect des préparations de la saison.

 

Etre vigilant sur son comportement alimentaire au quotidien ne doit pas apparaître comme une contrainte. Il est important qu’une telle attitude devienne une habitude. C’est à cette condition que les excès exceptionnels seront bien tolérés, sans nuisance à l’organisme, bien au contraire puisqu’ils apparaîtront comme des stimulants qui obligeront l’organisme à réagire en mettant en branle tout le système émonctoriel (l’ensemble des émonctoires ou filtres). Et de ce fait, un grand nettoyage se fera tout naturellement et l’esprit festif sera préservé.

Ecurat, 22 janvier 2007